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L’Armagnac fait son comeback

L’eau-de-vie de vin de Gascogne a longtemps gardé cette étiquette de spiritueux rustique et désuet. Aujourd’hui, une nouvelle génération de producteurs bataillent pour donner un coup de jeunesse au plus vieux alcool de France. En avant l’armagnac !
Article - 28 janvier 2025

Grappe de raisins

 

Une catégorie dans une belle dynamique
Un style pop et graphique et des messages droit au but, voilà ce que révèle la nouvelle campagne publicitaire « Multiple par essence », lancée récemment par le Bureau National de l’Interprofession de l’Armagnac (BNIA) autour de trois visuels décapants et sur trois thèmes : un processus de production atypique ; des modes variés de consommation ; une place dans le monde du cocktail. « On a souhaité montrer l’armagnac sur toutes ses coutures en réinventant et modernisant son image vieillissante », raconte Maeva Vidonne, responsable communication et promotion de l’interprofession qui planche sur la renaissance de l’AOC de Gascogne aux côté d’Olivier Goujon, directeur du BNIA. Oui l’armagnac est aujourd’hui trendy et voici quelques chiffres à l’appui : un CA de 56 millions € en 2022, 3,9 millions de bouteilles vendus en 2022 dont 1,33 millions en France (+4,4 % depuis 2019) et environ 600 producteurs actifs. Des résultats positifs qui progressent doucement mais sûrement. « Les tendances sont bonnes pour la première fois depuis 4-5 ans. Nous motivons les producteurs à distiller le plus possible», commente fièrement Jérôme Delors, président du BNIA. Côté export, les producteurs ont également le sourire au vue d’une augmentation des ventes de + 5 % depuis 2019, à l’image de la maison Château Laubade qui peut se targuer d’une belle croissance sur le marché américain.« Nous avons gagné 30 % en 5-6 ans. L’armagnac a un grand capitale sympathie et il est très apprécié pour son côté artisanal », explique Denis Lesgourgues co-propriétaire et directeur export.

Des acteurs qui cassent les codes 
Répartie sous trois appellations, le Bas Armagnac (81 % de surface distillée), l’Armagnac Ténarèze  et Haut Armagnac , cette eau-de-vie de vin doit sa richesse aromatique à la variété de ces  terroirs et des cépages utilisés (majoritairement Ugni blanc, Baco, Colombard et Folle Blanche, ) mais pas que. La distillation continue, réalisée avec un alambic à colonne armagnaçais lui confère ces arômes puissants et complexes. Des atouts qui ont séduit  une nouvelle vague d’artisans depuis plus de 10 ans, prêts à retrousser leurs manches pour mettre en lumière ce spiritueux méconnu. L’un des premiers mousquetaires se nomme Cyril Laudet. En 2014, le représentant de la 8ème génération du Domaine Laballe, a lancé une collection révolutionnaire, Laballe 3-12-21, présentant trois types de vieillissement, trois modes de consommation (sur glace, cocktail et dégustation) et un embouteillage de 50 cl avant-gardiste pour la catégorie. « J’avais envie de choquer et d’interpeller l’univers de l’armagnac et montrer aux consommateurs que nous sommes un spiritueux de vignerons », commente l’entrepreneur novateur. Pari gagné ! Comme dans le rhum et le whisky, l’armagnac intéresse les embouteilleurs indépendants appelé « négociant-éleveur » dans la catégorie. Bel exemple avec la société Encantada (enchanteur en gascon) fondée en 2011 par trois amis novices en la matière. Sa spécialité : une sélection pointue de barriques issues de petits producteurs, élevées dans ses chais à Vic-Fezensac dans le Gers. Les eaux-de-vie sont embouteillés « brut de fût ». Des cuvées très expressives  pour des amateurs de spiritueux de whisky !
Des innovations entre l’armagnac bio et la Blanche
L’agriculture biologique est l’un des nouveaux focus de la filière, respectueuse de la biodiversité. L’Armagnac Darroze, spécialiste des millésimes et des assemblages subtiles, représente l’un des premières maisons familiales à confectionner une cuvée biologique en partenariat avec des vignerons engagés. Une tendance suivie par d’autres producteurs tout comme la Blanche Armagnac, le nouveau fleuron de la catégorie, un jeune AOC né en 2005 et plébiscité pour sa fraîcheur et ses notes fruitées. La majorité des maisons d’armagnac distille cette cuvée non vieillie pour une nouvelle cible, la mixologie.

La nouvelle pépite du cocktail :
Contrairement au cognac, l’armagnac n’est pas l’un des premiers spiritueux mixés dans l’histoire du cocktail. La tendance made in France a suscité l’intérêt des barmen pour cette eau-de-vie de terroir. Damien Hillion de la maison Dartigalongue, l’a compris en créant la première gamme axée mixologie avec la blanche « Un-Oaked Armagnac et le jeune armagnac vieilli, « Dartigalongue Dry Cellar ». Un carton ! Nicolas Blanchard, propriétaire du bar l’Heure du Singe à Toulouse fait partie des barmen qui travaille l’AOC depuis de nombreuses années : « J’utilise la Blanche pour remplacer le pisco. Pour l’armagnac vieux, mon choix se porte sur le VSOP brut de fût qui apporte de belles notes fruitées et une certaine nervosité à nos créations.». En voici la démonstration avec ce Mai Tai version Occitanie.
Lo Mai Grand

Ingrédients :
2 cl de jus de citron jaune
1,5 cl de sirop d’orgeat
1cl de Pousse rapière à 36 %
1,5cl de Florio Marsala seco
4 cl d’Armagnac Jean Cavé 2009 brut de fut à 53 %
2 traits d’Angostura bitters
Réalisation :
Au shaker.

By Laurence Marot